Calvin et Les Pères de l'église

Extrait de la lettre de Jean Calvin à François Ier - introduction de l'institution chrétienne.

Calvin prouve par les Pères que certaines doctrines romaines s'écartent de la foi "catholique" et sont donc "hérétiques".

Le témoignage des Pères de l'Eglise

C’est à tort qu'ils invoquent les Pères anciens. S’il fallait invoquer leur autorité pour trancher entre nous, la meilleure partie du combat serait en notre faveur.

Ces Pères anciens ont écrit avec sagesse des choses excellentes, il leur est aussi arrivé, de se tromper.

Nos détracteurs adorent seulement les erreurs et les fautes des Pères comme si leur seul souci était de recueillir de la fiente dans de l’or.

La borne ancienne

On nous objecte qu'il « ne faut pas déplacer la borne ancienne que tes pères ont posée » (Proverbes 22.28)

Il n’est pas question d’observer une même règle pour le bornage des champs et pour l’obéissance de la foi.

Pourquoi ne prennent-ils pas pour Pères les apôtres eux-mêmes, dont il n’est pas permis d’arracher les bornes, plutôt que tout autre?

s’ils veulent que les limites des Pères soient observées, pourquoi les franchissent-ils si audacieusement?

Le culte des images

Il était Père celui qui a dit que voir, dans les temples des chrétiens, une image ou de Christ ou de quelque saint était une horrible abomination(28). Cela n’a pas été dit seulement par un homme particulier, mais a aussi été décidé par un concile ancien (Concile d’Elvire)(29) : que ce qu’on adore ne soit ni une peinture ni un portrait. Il s’en faut de beaucoup qu’ils respectent ces limites, lorsqu’ils ne laissent pas le moindre petit coin vide de simulacres dans leurs églises.

Les reliques

Un autre Père de l'Eglise (Saint Ambroise) a conseillé de laisser reposer les morts après avoir effectué leur sépulture(30). Nos détracteurs débordent les limites lorsqu’ils requièrent qu’on se préoccupe constamment des défunts.

reliques de SAint Pierre procession reliques

L'eucharistie

C’est aussi un Père (pape saint Gélase Ier), qui a dit que la substance et la nature du pain et du vin demeurent dans le sacrement de la cène(31). Ils ne tiennent pas compte de cette limite lorsqu’ils font croire qu’immédiatement après que les paroles sacramentelles ont été récitées, la substance du pain et du vin est anéantie.

L'adoration de l'hostie

Il était également au nombre des Pères de l'Eglise celui (Saint Chrysostome) qui a nié que, dans le sacrement de la cène, le corps de Christ était enfermé dans le pain, mais que c’était seulement le signe de son corps(31). Nos détracteurs passent donc la limite en disant que le corps de Christ est contenu là et qu’ils le font adorer de façon charnelle, comme s’il y était localement.

Ils étaient également des Pères de l'Eglise ceux dont l’un a ordonné que soient entièrement rejetées de la participation à la cène les personnes qui, prenant l’une des espèces, s’abstenaient de la seconde(34).

Le dogme

Saint Augustin était aussi au nombre des Pères de l'Eglise: il affirme qu’il est illégitime de déclarer quelque chose d’obscur sur un point ou sur un autre, sans témoignages clairs et évidents de l’Écriture(37). Nos détracteurs ont bien oublié cela en élaborant des constitutions, des canons et des décisions doctrinales, sans une seule parole de Dieu.

Le célibat des prêtres

C’est un Père qui a soutenu que le mariage ne devait pas être interdit aux ministres de l’Église, et qui a déclaré que la compagnie d’une femme légitime était l’équivalent de l’état de chasteté(41) ; et ceux qui étaient d’accord avec lui étaient des Pères de l'Eglise(42). Ils ont franchi la limite, quand le célibat a été ordonné à leurs prêtres.

La primauté du Pape

Saint Cyprien a écrit: "on doit écouter Christ seul, n’ayez pas égard à ce qu’auront fait ou dit les autres avant nous, mais suivez seulement ce qu’aura commandé Christ, qui est le premier de tous"(43). Il était un des plus anciens Pères de l'Eglise.
Nos détracteurs ne se sont pas maintenus dans ces limites et n’ont pas permis que les autres s’y maintiennent, lorsqu’ils ont institué au-dessus d’eux, comme des autres, des maîtres nouveaux en dehors de Christ.

C’est un Père (Saint Augustin) qui a maintenu que l’Église ne doit pas se préférer à Christ, puisque lui juge toujours droitement, mais que les juges ecclésiastiques, peuvent souvent se tromper(44). Ils rompent bien une telle limite en estimant que l’autorité de l’Écriture dépend du bon plaisir de l’Église(45).

Conclusion

J’aurais trop à dire si je voulais exposer avec quelle insouciance ils rejettent le joug des Pères de l'Eglise, dont ils disent vouloir être les obéissants disciples. Il me faudrait y passer des mois et des années. Et pourtant, leur impudence est telle qu’ils osent nous reprocher de ne pas respecter les limites anciennes des Pères de l'Eglise!

Références des citations des pères de l'Eglise

21. Jean Cochlée, De libero arbitrio hominis, I, B 4b; Jean Eck, Enchiridion, 1, B 2 a.
22. Gratien, Décret, II, C.24 q.3 c.33; Saint Jérôme, Commentaire sur Osée, II, sur Osée 5.10.
23. Acace, évêque d’Amide, citation par Cassiodore, Histoire tripartite, XI, 16.
24. Saint Ambroise, Sur les devoirs des ministres sacrés, II, XXVIII.
25. Spyridon, évêque de Trimythonte (Chypre), citation par Cassiodore, Histoire tripartite, I, 10.
26. Ibid., VIII, 1; allusion probable à Sérapion, supérieur d’un monastère près d’Arsinoé en Égypte.
27. Saint Augustin, Du travail des moines, XVII.
28. Lettre d’Épiphane de Salamine à Jean de Jérusalem, traduite par Saint Jérôme, Lettres, LI, 9.
29. Concile d’Elvire (306), canon 3.
30. Saint Ambroise, Sur Abraham, I, IX, 80.
31. Saint Gélase Ier, Contre Eutychès et Nestorius sur les deux natures du Christ, III, 14.
32. Pseudo-Chrysostome, Opus imperfectum in Matthaeum, homélie XI.
33. Il s’agit de la transsubstantiation; IVe Concile du Latran (1215), canon 1.
34. Gratien, Décret, III (De consecratione), D.2 c.12 (de Gélase).
35. Saint Cyprien, Sur les apostats, XXII, XXV; Correspondance, lettre LVII, 2.
36. Concile de Constance (1415), session 13, Définition de la communion sous chaque espèce; Martin V, bulle In eminentis.
37. Saint Augustin, Du mérite et de la rémission des péchés et du baptême des petits enfants, II, XXXVI, 58.
38. Le montanisme, mouvement chrétien hétérodoxe du IIe siècle, fondé par le prophète Montan en Phrygie, région de la Turquie actuelle, apparaît au moment où l’Église s’organise. Ces chrétiens rejetaient le clergé et fondaient leur croyance sur la promesse du Paraclet et son action continue.
39. Eusèbe de Césarée, Histoire ecclésiastique, V, XVIII, 2.
40.Gratien, Décret, III (De consecratione), D.3 c.3 sqq.
41. Paphnuce cité par Cassiodore, Histoire tripartite, II, 14.
42. Gratien, Décret, I, D.28 c.15.
43. Saint Cyprien, Correspondance, lettre LXIII, 14.
44. Saint Augustin, Réponse à Cresconius, grammairien et donatiste, II, XXI.
45. Jean Eck, Enchiridion, 1, A 6 b; Alphonse de Castro, Adversus omnes haereses, I, 2, fo 5 D.
46. Tertullien, Traité de la prescription contre les hérétiques, VII; Saint Augustin, La doctrine chrétienne, II, XXXI, 48.